Les licenciements pendant la période Covid-19 seront davantage contestables devant les Prud’hommes
La loi d’urgence pour faire face à l’épidémie de Covid-19 du 23 mars 2020 contient une série de mesures exceptionnelles qui assouplissent considérablement le code du travail.
En dérogeant aux règles d’ordre public et aux stipulations conventionnelles relatives à la durée du travail, au repos hebdomadaire et au repos dominical, en permettant aux employeurs d’imposer à leurs salariés la prise de jours de congés et de RTT, le gouvernement entend soutenir la trésorerie des entreprises et maintenir les emplois.
Après une prise de position ferme contre tout licenciement intervenu en période de crise sanitaire (« Pendant la période actuelle, c’est zéro licenciement », avait annoncé la ministre du Travail, Muriel Pénicaud), le gouvernement n’a finalement édicté aucune interdiction formelle de rompre le contrat de travail durant cette période, contrairement à nos voisins espagnols.
Si le licenciement pour motif personnel ou pour motif économique reste donc possible, le gouvernement entend inciter les entreprises en difficulté à recourir au chômage partiel. Comme l’a rappelé Muriel Pénicaud, l’objectif est donc de ne pas licencier.
Compte tenu des directives données par l’Etat, tout licenciement intervenu au cours de cette période et qui donnerait lieu à contestation devant la juridiction prud’homale sera sévèrement contrôlé par les juges.
Pour les licenciements économiques, s’il va de soi qu’une suppression de poste devra être motivée par des difficultés financières avérées, la situation économique de l’entreprise avant l’épidémie de Covid-19 devra également être prise en compte pour apprécier la réalité de ces difficultés.
Il est important de rappeler que l’état de crise sanitaire ne constitue pas en soi un motif de licenciement économique.
Il est également à prévoir que les licenciements prononcés pour motif personnel (notamment disciplinaires ou pour insuffisance professionnelle) seront passés au crible du contrôle judiciaire en cas de contestation du salarié.
L’appréciation de la cause réelle et sérieuse du licenciement par les juges risque donc d’être plus stricte, au regard des mesures dont auront bénéficié les employeurs pour maintenir l’emploi dans leur entreprise.
Outre l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse versée au salarié, l’employeur pourra être amené à verser des sommes à Pôle emploi.
L’article L. 1235-4 du code du travail prévoit en effet qu’en cas de licenciement jugé sans cause réelle et sérieuse ou nul, l’employeur peut se voir réclamer par Pôle emploi le remboursement des allocations chômages versées à son ancien salarié à la suite de la rupture, dans la limite de 6 mois (excepté pour les licenciements de salariés ayant moins de deux années d’ancienneté et les licenciements intervenus dans des entreprises de moins de 11 salariés).
Si cette faculté n’était jusque-là pas systématiquement mise en oeuvre par Pôle emploi, elle pourrait le devenir pour les licenciements qui seront reconnus abusifs à l’issue de la période d’urgence sanitaire.